LE MOHICAN

Écrit et réalisé par Frédéric FARUCCI - France 2024 1h27mn - avec Alexis Manenti, Mara Taquin, Théo Frimagacci, Paul Garatte...

Du 12/02/25 au 04/03/25

Après À son image, après Le Royaume, encore un film corse qu’il ne faut absolument pas rater ! Ce formidable Le Mohican, entre thriller politique et western contemporain, nous a tenus en haleine et nous a emballés par sa subtilité, par l’ampleur de son récit et de son propos.

Le film s’ouvre par les propos d’un vieil autochtone qui se rappelle que dans sa jeunesse, les terrains du bord de mer ne valaient tellement rien qu’on les léguait aux filles ! Cela en dit long sur la place des femmes… Puis vint notre époque moderne, son tourisme de masse, sa spéculation immobilière galopante… Ce qui n’avait pas de valeur en prit de façon déraisonnable. Ainsi va l’histoire. Progressivement, les bergers du littoral ont été chassés vers l’intérieur des terres : place aux hôtels de luxe et à la bétonisation sans partage… Voilà le contexte brossé. Au moment où démarre notre histoire, Joseph (admirablement campé par Alexis Manenti) est bien l’un des derniers bergers de la côte à résister à l’appât du gain et il voit bien qu’autour de lui l’étau se resserre. Lui qui est un paysan, amoureux de sa ferme et de ses bêtes, qui n’a jamais rêvé d’autre chose, se prend à trembler à l’idée de la visite fatidique d’un promoteur immobilier qui lui proposera, presque le couteau sous la gorge, de racheter son terrain à prix d’or. Sur l’île de Beauté, qui dit affaire de gros sous dit que la mafia n’est pas loin, avec des moyens de contrainte disproportionnés pour un simple gars de la terre. Les copains lui conseillent de céder, de ne pas résister, d’accepter la manne financière. Mais pour certains, l’argent n’est pas le principal, il passe après les valeurs essentielles. Joseph repousse donc sans précaution la proposition dont on lui a pourtant bien fait comprendre qu’il ne pouvait pas la refuser. Et bien sûr, ça va tourner au vinaigre, dans le feu d’un combat à armes inégales, pot de terre contre pot de fer, David contre Goliath… qui semble perdu d’avance.
Mais c’est peut-être compter sans la présence d’une jeune femme, venue passer sur l’île quelques jours de vacances. La nièce de Joseph, Vannina, comprenant le danger et indignée, va utiliser un moyen inattendu, « moderne », à vrai dire le seul à sa portée : la force des réseaux sociaux pour alerter l’opinion publique… #DernierMohican deviendra vite viral, tenant en haleine toute l’île et se propageant bien au-delà…

Cette mobilisation sera-t-elle suffisante pour protéger un mode de vie, une façon ancestrale de veiller sur la terre ? Suffisante pour sauver la vie de Joseph parti en cavale, peu familier de la clandestinité et de la violence ? Cette histoire particulière, solidement ancrée dans son territoire, résonne avec beaucoup d’autres histoires de résistance, de luttes menées par beaucoup d’autres indigènes chassés de leur territoire par d’autres formes d’impérialismes… et se charge d’une portée diantrement universelle. Le travail de Frédéric Farrucci est d’autant plus passionnant qu’il utilise, pour reprendre sa propre expression, le « film de genre comme un cheval de Troie, afin d’entrainer les spectateurs dans une histoire menée tambour battant tout en portant un regard sur l’époque, sur la société, sur l’humain en général »…